En 2013, tremblante dans la grande salle du Palais des papes d’Avignon, j’ai donné ma toute première conférence.

En 2024, totalement relax sans ordinateur à l’Institut Pasteur, j’ai donné la dixième.

Tout au long de ces onze années, j’ai parlé en public à Sud Web, à Mixit, au BlendWebMix, à Paris Web… et aussi quelques incursions à Clermont-Ferrand et à Bordeaux. J’ai essayé différentes durées, du lightning talk de cinq minutes à l’atelier de deux heures. J’ai testé en solo et en binôme, ultra-préparée et à l’arrache presque totale. J’ai parlé sur scène, en classe, en ligne.

J’ai surtout parlé d’organisation et de méthodes de travail, avec beaucoup de retours d’expérience, et de temps en temps des sujets plus techniques comme mon atelier sur git ou le fonctionnement des sites sur liseuse.

J’ai mes goûts, mes conférences chouchoutes et mes formats préférés. Je préfère être préparée mais parfois la vraie vie s’impose à moi et je dois improviser. Je sais qu’en vrai je sais broder sur les sujets qui m’animent, ce n’est pas pour autant que j’aime ça.

J’ai appris à connaître mes forces et mes faiblesses. J’ai arrêté d’essayer de faire le show, j’ai considérablement travaillé mon articulation et le débit de mes paroles. Je sais que je ne peux pas présenter sans micro, malgré mes quelques années de théâtre. En contrepartie j’ai appris à tirer parti de ma voix posée et de mon humour pince-sans-rire qui a très bien fonctionné cette année, à mon plus grand ravissement. Je sais que je sais expliquer, vulgariser un sujet technique ou scientifique. Plus important encore, j’aime ça.

Bref, je crois que je commence à être une conférencière expérimentée. J’ai voulu donner une conférence sur ce sujet, d’ailleurs.

Je me suis posé la question : est-ce que je continue ? Je suis partagée.

D’un côté, peut-être que l’on m’a assez vue. Peut-être aussi que je vais radoter. Et puis il faudrait laisser de la place aux nouvelles et aux nouveaux, non ?

D’un autre côté…

D’un autre côté, j’adore ça. Monter sur scène la gorge serrée par le trac, et me détendre au fur et à mesure que je reprends mes aises dans le sujet et les rires du public qui prouvent que j’ai capté l’attention : je n’ai pas envie d’arrêter. Même la préparation, j’aime ça, y compris la phase récurrente et rigoureusement systématique où je peste contre moi-même et mes envies de célébrité.

Toujours de cet autre côté, je constate que j’ai toujours des choses à partager et à apprendre. J’apprends énormément à chaque préparation de conférence, évidemment sur les sujets techniques comme la double authentification, mais aussi pour un simple retour d’expérience sur les revues de code par exemple. Et après la conf, rassembler des gens dans une pièce (bien aérée svp) permet des échanges plus riches que sur un blog ou un réseau social.

Un autre aspect qui n’est pas à négliger même si je n’aime pas être un “totem de diversité”, c’est que, quand je monte sur scène pour parler d’un sujet technique, je représente davantage que moi-même. Je suis aussi toutes les femmes de la tech. Non seulement un rappel pour ces gars-là que je suis bien là et que je sais de quoi je parle, mais aussi une preuve et un modèle pour les nouvelles et actuelles femmes du métier.

En résumé, je ne suis pas vraiment partagée, je sais bien que je vais continuer. Au moins donner à nouveau ma conf sur la double authentification. Et quand, dans un ou deux ans, je me serai remise de mon intense préparation, j’aurai probablement d’autres idées : l’expérience m’a montré que l’inspiration finit toujours par revenir.

Je voudrais quand même reprendre une petite activité de mentorat pour les personnes qui donnent leur première conférence. Fun fact : à l’origine, je voulais écrire un article de conseils pour construire une conférence. Je me suis laissé porter par le flux de l’inspiration, qui m’a finalement emmenée ailleurs.